On est entre nous, parle moi d'un film
Suspiria (1977), Dario Argento : « En gros, si Argento veut montrer du danger, de la peur, ou du fantastique, Argento choisit le plus gros spot rouge, bleu ou vert qu'il a. »
Il est tard. La pluie est sourde. La jeune américaine Suzy Banner atterri à l'aéroport de Fribourg. Elle est danseuse et s'est inscrite à l'Académie de la ville. Mais ça ne va pas : le rouge vif envahit l'écran ; la musique obsédante et stridente, comme émanant de l'extérieur, met en garde la jeune femme. Non, ne sors pas. Elle s'obstine. Pourtant, tout cherche à la retenir, à la faire fuir, que ce soit la pluie battante ou le chauffeur nonchalant, la fille qui sort de l'académie en hurlant ou l'interphone qui ne la reconnait pas. Mais fuir quoi, ou fuir qui ? *un chouillat de spoils* C'est ainsi que débute l'oeuvre du maître de l'horreur italien. Argento nous ballade dans ses décors art-décos parfois surréalistes (des kilomètres de fils de fer entortillés dans une pièce de 10m2, vraiment Dario ?), où la cruauté qu'il a envers ses personnages se libère. Les gorges tranchées se succèdent de la main de ce même gant noir ; l'aveugle se fait bouffer par son propre chien ; une fille fait une chute à travers un plafonnier de verre. On pardonnera même le sang un peu trop fushia et la peau scalpée trop siliconée. Si vous avez aimé The Neon Demon, la photographie de ce film vous fera jouir par ses couleurs accrues qui, certes, sont loin d'être subtiles, mais qui confèrent à l'oeuvre une atmosphère singulière et surréaliste. En gros, si Argento veut montrer du danger, de la peur, ou du fantastique, Argento choisit le plus gros spot rouge, bleu ou vert qu'il a. Il faut voir Suspiria, vraiment, c'est très très bien. (La scène des vers qui tombent du plafond est à jamais dans mon coeur.)